Au xixe et au début du xxe siècle, l’épicerie est un endroit où l’on vend absolument de tout : des denrées alimentaires comme du sucre, de la farine et du café, mais aussi des peaux de chamois et même du pétrole.
Le magasin a un comptoir central. Sur celui-ci se trouve la caisse, protégée par une grille. La balance avec ses poids est un autre instrument important pour l’épicier : il s’en sert pour peser toutes les marchandises vendues en vrac, avant de les emballer dans un des sachets en papier qui pendent au-dessus du comptoir.
L’épicier ne vend que du café en grains, car il se conserve plus longtemps. À la demande du client, il le moud dans son moulin à café. Dans le fond du magasin, sur l’étagère, se trouvent des récipients en bois contenant des herbes aromatiques séchées, que l’épicier pèse méticuleusement comme toutes les autres marchandises. D’un côté du comptoir, il empile des bouteilles contenant différentes huiles, de l’autre toutes sortes de savons.
L’essor de l’emballage en carton, pour le savon et les biscuits par exemple, marque la fin de toutes ces pesées. Les sacs en papier sont remplacés par des boîtes contenant une quantité de produit prédéterminée par le fabricant. Les marques aussi font leur apparition : l’affiche publicitaire pour des biscuits que vous voyez dans le fond du magasin en est un bel exemple.
L’épicerie pleine à craquer d’antan ressemble à un petit supermarché. Mieux encore : ce que l’épicier n’a pas de stock, il le commande immédiatement. L’enseigne « Poer en Zaed », que l’on peut traduire par « poudre à fusil et plomb », est dès lors tout à fait typique d’une épicerie qui, à l’époque, propose vraiment de tout.
Savez-vous à quoi servent les bâtonnets en bois près des sachets au-dessus du comptoir ? Ce sont des bâtons de taille, sur lesquels l’épicier indique par une encoche combien d’argent un client lui doit. C’est un système honnête : épicier et client conservent tous deux la moitié du bâton de taille, avec une encoche identique sur les deux parties. Une fois la dette acquittée, l’épicier coupe le renflement dans le haut du bâton.
Les premières poudres à lessiver arrivent sur le marché belge dans les années 1930 : des poudres agglomérées qui contiennent à la fois du savon, des agents blanchisseurs et des adoucisseurs d’eau. Jusque-là, la ménagère combinait elle-même toutes sortes de détergents et agents blanchisseurs selon le type de textile. Cela nécessitait pas mal de connaissances et la lessive ne se faisait pas toujours sans mal. Le savon sunlight râpé se dissolvait en effet difficilement dans l’eau, qui n’était pas toujours très chaude, tandis que la dureté de l’eau posait aussi un problème. Grâce à l’ajout de poudre à blanchir dans les nouveaux produits de lessive, il n’est plus nécessaire de blanchir le linge séparément.
Plus tard, dans les années 50, les premiers détergents synthétiques font leur apparition sur le marché. Pour vanter les mérites de ces nouveaux produits, les entreprises organisaient de véritables défilés avec des emballages géants et parfois même des éléphants et des dromadaires.
Jusque dans les années 1950, la chicorée est fréquemment utilisée comme ersatz de café ou ajoutée comme aromatisant au café. La racine de chicorée est une plante de la famille du chicon et de l’endive. Séchée et torréfiée, la chicorée prend un goût de caramel. La chicorée-café est torréfiée, moulue et emballée dans des usines de torréfaction ou – à plus petite échelle – avec un torréfacteur à chicorée comme celui-ci.
Dans les années de guerre et de crise, lorsque la limitation des importations fait grimper le prix du café, cet ersatz de café est très largement consommé. La Flandre-Occidentale est la championne de la culture de la chicorée. L’industrie de transformation de la chicorée se concentre à Roulers, avec 37 usines de chicorée en 1889.
De nombreuses inventions doivent leur succès aux guerres. C’est notamment le cas de la margarine. Vers 1850, le prix du beurre flambe en France. L’empereur Napoléon III lance alors un concours pour le développement d’un substitut meilleur marché. Avec comme condition supplémentaire que le produit à tartiner ne s’altère pas aussi rapidement que le beurre, de manière à ce que ses soldats puissent l’emporter en campagne militaire. En 1896, le chimiste français Hippolyte Mège-Mouriès fait breveter un tel produit, composé de graisse de bœuf, de lait écrémé et de mamelle de vache découpée en petits morceaux. À partir de 1872, des usines de margarine sont créées aux Pays-Bas et en Belgique. Le nouveau produit connaît directement un franc succès. Plus tard, la graisse animale est remplacée par des huiles végétales.