La vanité de l’existence humaine est le thème de la « tête » que Strook a réalisée pour l’église Notre-Dame. Il représente l’homme ordinaire à une échelle monumentale. L’immobilité et l’attitude du portrait conviennent à la sacralité du lieu. Strook grossit la futilité et la fragilité de l’être humain jusqu’à en faire un relief de 3 mètres 40 de haut. Inhabituel dans une église catholique, où ce format est normalement réservé aux retables bibliques ou aux statues de saints. Certaines personnes trouvent qu’il se dégage quelque chose de sacré des têtes de Strook. À travers son œuvre, il veut inciter le spectateur à prêter attention au temps et à réfléchir à la vanité de l’existence humaine.
Pour ses portraits, Strook utilise des matériaux qui ont subi les outrages du temps. Il touche ainsi à l’essence de la condition humaine : en tant que personnes, nous sommes pétris par le temps. Par ce que nous vivons, ce que nous traînons avec nous et ce que nous finissons par oublier. Dans son œuvre, Strook essaie de fixer le temps, qui continue néanmoins à s’écouler et à passer. Il cite le passé, auquel tout et tout le monde appartiendra un jour. Lui-même et son art également. Dans ce sens, son œuvre s’inscrit dans la tradition du memento mori, ce rappel de la finitude de l’être humain, de la fragilité de l’existence et de la fugacité de la vie.
Strook ne pourrait pas mettre autant de strates de sens dans son œuvre avec du bois neuf. Le bois qu’il utilise est une métaphore de la manière dont nous, êtres humains, sommes égratignés, éclatés, brisés ou marqués. Nous avons tous nos cicatrices, nos rides et nos failles. D’habitude, nous les cachons, mais elles sont extériorisées dans l’œuvre de Strook.
Son œuvre est très actuelle, même si son point de départ est le passé. Strook fait de l’art contemporain avec une âme ancienne. Quand on regarde son œuvre, on voit le passé et on observe comment il l’aborde en tant qu’artiste. Ses assemblages en bois sont littéralement un « passé composé ». Strook combine des matériaux qu’il a trouvés en divers lieux. Il remixe des ruines pour en faire des portraits.
Strook ne fait pas des portraits de personnes précises. Il se contente de représenter leur émotion ou leur attitude. En déshumanisant ses figures, il les rend sujettes à interprétation. Certains trouvent en elles du réconfort, d’autres y décèlent un sentiment de deuil ou de la mélancolie. Les « têtes » de Strook ont une expression universelle. Chacun peut leur donner sa propre signification.
Ses figures s’adressent directement au spectateur, même si elles ne sont pas identifiables. Leur identité est indéterminée, l’accent étant mis sur l’attitude et l’émotion. Cet anonymat renforce précisément l’empathie. Les figures de Strook se sont effondrées émotionnellement. Mais les craquelures, les fêlures révèlent les traces de la vie.